Le Journal de Montréal >
On croyait le phénomène en baisse. Eh non. Le fameux «Bonjour-Hi» qui égratigne tant les oreilles, celui-là même lancé aux clients médusés, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, de savoir qu’autant de commerçants les pensent incapables de comprendre à lui seul le mot «Bonjour», prend de l’ampleur.
La semaine dernière, ma collègue Sophie Durocher donnait ici plusieurs exemples tous les plus exaspérants les uns que les autres. Des exemples qui vont bien au-delà encore du «Bonjour-Hi» et qui montrent à quel point le français prend le bord au profit de l’anglais.
Car ne nous le cachons pas. Le «Bonjour-Hi» n’est qu’un symptôme parmi d’autres du recul du français dans la grande région montréalaise et ses couronnes.
Ceux et celles qui me lisent savent que le sort de la langue française me tient à cœur depuis très longtemps et que j’ai beaucoup travaillé à sa défense.
Je sais donc d’office que de «bien parler» le français avec le sourire ne fait rien pour le renforcer face au pouvoir d’attraction de l’anglais.
Seules des mesures législatives claires et efficaces combinées à une volonté politique avérée des gouvernements à les appliquer, peut donner du souffle au rapport de forces du français face à l’anglais.
Or, comme on le sait, cette condition sine qua non manque à l’appel au Québec depuis de nombreuses années.
Le «Bonjour-Hi» a donc pu prospérer dans ce terreau malheureusement très fertile pour lui.
Et qu’on ne nous parle pas non plus de la petite motion timide adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 30 novembre 2017 sous le gouvernement Couillard :
«Que l’Assemblée nationale réaffirme clairement à tous que le français est la langue officielle et commune du Québec;
«Qu’elle prenne acte que 94 % des résidents du Québec comprennent le français;
«Qu’elle rappelle que le mot « Bonjour » est un des mots de la langue française les plus connus chez les non-francophones du monde;
«Qu’elle rappelle que ce mot exprime magnifiquement la convivialité québécoise;
«Qu’en conséquence, elle invite tous les commerçants et tous les salariés qui sont en contact avec la clientèle locale et internationale de les accueillir chaleureusement avec le mot Bonjour.»
C’était franchement gênant de réserve. Résultat : ce fut un colossal coup d’épée dans l’eau.
Nous voilà donc réduits comme dans les années 60, à «gérer» le tout sur une base strictement individuelle. Comme recul politique, c’est tout de même impressionnant.
Donc, en attendant que l’on renforce concrètement un jour le français dans les milieux de travail, y compris dans les commerces de la métropole, que faire devant le «Bonjour-Hi» tout en restant poli et civilisé?