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Un rapport accablant démontre la mainmise du réseau d’ONG du milliardaire sur la CEDH, qui impose à l’Europe son idéologie de la “société ouverte”. Révélations exclusives.
L’Autriche, la Grèce et l’Italie sont forcées de légaliser les unions homosexuelles ; la Pologne est sommée de favoriser le droit à l’avortement ; la France est obligée d’autoriser le changement de sexe “sur le papier” ; la Hongrie est contrainte d’abolir la prison à vie ; la Russie est sanctionnée pour avoir condamné les activistes féministes punks des Pussy Riot ; l’Autriche doit légaliser l’adoption par les couples homosexuels ; l’application de la charia en Grèce est validée. Des affaires sans lien entre elles ? Au contraire. Chaque fois, c’est la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui dicte sa loi à un pays européen. Chaque fois, une ONG liée au réseau de l’Open Society Foundations (OSF) est impliquée dans l’affaire. Chaque fois, l’un des magistrats qui prononcent le jugement est un ancien collaborateur de l’OSF ou de ses affiliées. Chaque fois, la sentence porte la marque de George Soros.
Chapitre 1 – Aux sources d’une enquête, dans les arcanes du Palais des droits de l’homme
Il est “celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom”. En mai 2018, Valeurs actuelles consacrait un dossier au milliardaire américain d’origine hongroise qui, écrivions-nous, « est passé maître dans l’art de désordonner le monde sous couvert d’altruisme ». En dévoilant « la machination Soros », notre journal recevait, comme tous ceux qui voient en lui autre chose qu’un philanthrope désintéressé, l’infamant label “complotiste”.
Critiquer ses desseins, son idéologie et ses méthodes, c’est la certitude d’être rangé dans la case “fachosphère”, populiste ou antisémite ce qui prête à sourire quand on sait que Benyamin Nétanyahou, le Premier ministre israélien, est un virulent anti-Soros. Si le front d’opposition au milliardaire est aussi large, de Viktor Orbán à Donald Trump en passant par Vladimir Poutine, c’est que l’idéologie qu’il diffuse à travers son Open Society Foundations et sa myriade d’ONG a pour but de mettre fin aux nations et d’imposer à l’Occident son idéal de “société ouverte” et sans frontières, chère au philosophe Karl Popper dont il fut le disciple. Deux ans après la publication de cette enquête, un rapport accablant, que Valeurs actuelles révèle en exclusivité, vient éclairer la manière dont George Soros a infiltré la Cour européenne des droits de l’homme.
Tout commence à Strasbourg, dans les arcanes du Palais des droits de l’homme, emblématique siège de la CEDH conçu par l’architecte britannique lord Richard Rogers. Parmi les nombreuses ONG évoluant ici, le European Centre for Law and Justice (ECLJ) participe depuis plus de vingt ans au jeu d’influence et de lobbying qui se noue auprès des magistrats. Son directeur, Grégor Puppinck, intervient à la Cour dans de nombreuses affaires et entretient de bonnes relations avec la plupart de ses membres.
Un jour, il entend l’un d’entre eux évoquer l’existence à la Cour de « juges Soros » : on lui indique le cas du Hongrois András Sajó. L’universitaire est l’un des fondateurs de l’université d’Europe centrale de George Soros, dont il est par ailleurs un ami de longue date. Lié à l’OSF depuis 1988, il a siégé notamment au conseil d’administration de l’Open Society Justice Initiative de New York, de 2001 à 2007. C’est au cours de ces années qu’il joue un rôle déterminant dans l’“affaire des crucifix”.
On m’avait dit qu’il y avait un ou deux “ juges Soros”, mais aussi des francs-maçons ou des catholiques. Ça faisait partie de la représentativité du système
Flash-back. Jeudi 27 juillet 2006 : Soile Lautsi, une mère de famille italienne, saisit la CEDH pour contester la présence de crucifix dans les écoles publiques de la péninsule. Trois ans plus tard, Sajó siège dans la chambre qui condamne l’Italie, considérant que « l’exposition obligatoire d’un symbole d’une confession donnée dans l’exercice de la fonction publique […] restreint le droit des parents d’éduquer leurs enfants selon leurs convictions ». Les crucifix doivent disparaître. Le gouvernement italien confie alors à… Grégor Puppinck la direction de la stratégie pour obtenir le renvoi en grande chambre. Cette dernière, où András Sajó ne siège pas, renverse en 2011 le jugement et donne raison à l’Italie contre la plaignante. Après cette victoire, le juriste est fait cavaliere della Repubblica par le gouvernement, l’équivalent italien de la Légion d’honneur.
L’étrange virage idéologique de la Cour des droits de l’homme
Puppinck est aux premières loges, mais il ne soupçonne pas à l’époque l’existence d’un phénomène plus global. « On m’avait dit qu’il y avait un ou deux “ juges Soros” à la Cour, raconte-t-il, mais on n’y prêtait pas attention, car il y avait aussi des francs-maçons ou des catholiques. Ça faisait partie de la représentativité du système et des jeux d’influence habituels dans toute institution. »
Son attention est toutefois attirée, au fil des années, par la recrudescence de jurisprudences plus idéologiques qu’auparavant. La Cour, qui avait l’habitude de rendre des jugements sur le terrain de la justice, se prononce désormais de plus en plus souvent sur ceux de « la tolérance et l’esprit d’ouverture, sans lesquels il n’est pas de “société démocratique” », et se fait un devoir de « garantir les conditions du “vivre ensemble” en tant qu’élément de la “protection des droits et libertés d’autrui”. »
Dans les domaines de la liberté d’expression et de la liberté religieuse, ses décisions appuient systématiquement l’idée que « la diversité et le multiculturalisme sont et doivent rester des valeurs européennes essentielles ». L’idéologie de l’Open Society Foundations est de plus en plus visible. Dans l’esprit de Puppinck, il devient clair que les affaires “sociétales” « font l’objet d’un traitement spécial, toujours progressiste ».
En 2018, il entreprend d’analyser l’histoire et la jurisprudence de la Cour sur ce terrain, pour en exposer les ressorts idéologiques cela donne naissance au livre Les Droits de l’homme dénaturé (Les Éditions du Cerf). Mais c’est un épisode récent qui achève de le convaincre de la nécessité de se pencher cette fois-ci sur le fonctionnement interne de la Cour. Alors que la France vit l’épilogue de l’affaire Vincent Lambert, l’ECLJ travaille encore aux recours internationaux déposés au nom des parents du patient en état pauci-relationnel. Les Nations unies acceptent ce recours, de même que la cour d’appel de Paris. Mais la CEDH les rejette tous, « d’un revers de la main, sans examen sur le fond », se souvient Puppinck. « Manifestement, c’était jugé d’avance. »
Six mois de recherche méthodique et 200 pages de rapport plus tard…
Soros aime à se présenter comme « un chef d’État sans État ». Il n’a en effet nul besoin d’État pour mener à bien son projet… Les 47 pays signataires de la Convention européenne des droits de l’homme sont dans l’obligation de mettre leurs législations nationales en conformité avec la jurisprudence établie par la Cour. Pourquoi donc tenter d’influencer 47 États différents quand on peut directement leur dicter ce qu’ils doivent faire par l’intermédiaire d’une juridiction supranationale ?
L’affaire des crucifix trotte dans la tête de Grégor Puppinck, qui a assisté, depuis, à plusieurs situations dans lesquelles les liens d’un juge avec une organisation pouvaient affecter un jugement. Le docteur en droit entreprend alors un premier travail de fourmi : passer au crible les curriculum vitæ des 100 juges ayant siégé depuis 2009 pour identifier leurs liens avec les ONG actives auprès de la CEDH. Il épluche méticuleusement toutes les données publiques mises à disposition par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Cette recension le mène beaucoup plus loin que ce à quoi il s’attendait. Six mois de recherche méthodique plus tard, il en tire une enquête fouillée appuyée par près de 200 pages d’annexes. Son travail dévoile un système qui a permis au réseau d’ONG de George Soros d’étendre son influence sur la Cour européenne des droits de l’homme et de la convertir progressivement à son idéologie.
Chapitre 2 – ONG, juges et rideau de fer… les raisons d’une accointance
Pour comprendre comment le réseau de l’Open Society a pu infiltrer la plus haute juridiction européenne, il faut d’abord comprendre le fonctionnement de cette dernière. Chacun des 47 pays signataires de la Convention européenne des droits de l’homme compte un juge membre de la Cour. Lorsqu’un siège est à pourvoir, le gouvernement en question soumet une liste de trois candidats – pas nécessairement magistrats professionnels – à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) qui en élit un, pour un mandat de neuf ans non renouvelable.
Pour plusieurs raisons, les personnalités proposées à l’ACPE sont souvent issues d’organisations non gouvernementales. À l’époque du rideau de fer, la Cour fut pensée en opposition au pouvoir des États : chaque citoyen victime d’une oppression dans son pays peut présenter son cas à l’institution et espérer qu’elle lui donne raison contre son pays d’origine. Les ONG jouent un rôle central dans ce dispositif, car elles sont censées être indépendantes des gouvernements.
Avoir des juges issus d’ONG n’est pas gênant en soi, à condition que certaines ONG ne soient pas surreprésentées
Bien souvent, les requêtes sont déposées au nom d’un particulier par une ONG. Celle-ci peut également intervenir au cours de procès dans lesquels elle n’est pas requérante, par l’intermédiaire de la “tierce-intervention”, procédé qui permet de soumettre aux juges des éléments d’appréciation dans une affaire.
Dans certains pays, notamment les petits pays d’Europe de l’Est, il peut s’avérer très utile de “piocher” dans les ONG des juristes à la fois expérimentés en matière de droits de l’homme et indépendants à l’égard du gouvernement, ce qui n’est pas forcément le cas des hauts magistrats.
« Avoir des juges issus d’ONG n’est pas gênant en soi, explique Puppinck, à condition que certaines ONG ne soient pas surreprésentées. » C’est là tout le problème : les dix années passées au microscope par Puppinck montrent qu’il existe un très net déséquilibre en faveur de candidats issus de l’Open Society et de son réseau.
Chapitre 3 – Quand les “juges Soros” investissent la Cour des droits de l’homme
Soros, combien de divisions ? Entre 2009 et 2019, sept ONG – toutes liées à l’Open Society – ont “envoyé” certains de leurs collaborateurs à la Cour pour qu’ils y deviennent juge permanent. Parmi les 100 juges ayant siégé au cours de cette période, 22 ont un lien direct avec l’une de ces ONG, « que ce soit comme dirigeant, bénéficiaire de leurs financements ou comme participant notable et régulier à leurs activités », précise le compte rendu du rapport. Pour des raisons méthodologiques, Puppinck ne prend en compte dans son analyse que les juges dont le lien avec l’une de ces sept ONG est direct, mais si l’on prend en compte des liens plus indirects (l’OSF finance des centaines d’organisations et d’institutions), le nombre monte bien au-delà…
L’OSF et ses 32 milliards de dollars, sur le toit du monde des ONG
L’exercice de l’énumération, aussi fastidieux soit-il, est malheureusement indispensable pour mettre en lumière le poids de l’OSF à la CEDH. Sur la première marche du podium des ONG ayant “placé” un juge à la Cour, l’inévitable Open Society Foundations. Pas moins de douze juges ont siégé après avoir tenu des postes clés dans cette organisation ou l’une de ses diverses branches, en particulier l’Open Society Justice Initiative. Le réseau des comités et fondations Helsinki est également très présent avec sept juges, suivi par la Commission internationale des juristes (CIJ), cinq juges, la célèbre Amnesty International, trois juges, et les ONG Human Rights Watch (HRW), Centre sur les droits individuels en Europe (AIRE Centre), et le Centre international pour la protection judiciaire des droits de l’homme (Interights), un juge chacune. L’indépendance de ces ONG vis-à-vis de l’OSF du “philanthrope” américain n’est le plus souvent que factice, tant l’OPA menée par ce dernier depuis plus de trente ans sur le monde des organisations non gouvernementales fut efficace : toutes sont financées, parfois très largement, par l’organisation dans laquelle George Soros a investi 32 milliards de dollars depuis 1984.
Comment imaginer, par exemple, que Human Rights Watch puisse ne pas rendre de comptes à l’OSF, qui lui a versé 100 millions de dollars américains depuis 2010 ? Ou les comités Helsinki, dont 40 % du budget en 2017 était issu des ressources du milliardaire et de sa fondation ? La même année, la Commission internationale des juristes recevait 650 000 dollars, Amnesty International 300 000 dollars en 2016. Pour se convaincre de la convergence des intérêts de ces différentes organisations, il suffit de citer l’Open Society, qui revendique sur son site Internet le fait que le lien établi avec ses bénéficiaires ne soit pas seulement financier mais vise à mettre en place de véritables « alliances pour atteindre des objectifs stratégiques du programme de l’ open society » . L’OSF et les ONG qu’elle finance partagent donc, selon la première citée, les mêmes visées.
Quand un fonctionnaire du Conseil de l’Europe théorise l’“homo sorosensus”
Quelle est leur finalité ? On la trouve bien résumée dans la bouche d’un autre fonctionnaire européen, le Letton Nils Muiznieks, qui fut directeur des programmes de l’Open Society dans son pays avant d’accéder au poste de commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe. En 2009, il expliquait dans l’ Open Society News que l’OSF œuvre à l’avènement d’un « nouvel homme de la société ouverte », sobrement appelé « homo sorosensus » – du nom de leur bienfaiteur -, par opposition à l’ « homo sovieticus ». Dans les discours, ce soft power exercé par l’OSF prend la forme de la défense des droits de l’homme, des libertés individuelles, de la démocratie ou de la lutte contre le réchauffement climatique ; dans les faits, elle se concrétise par l’action en faveur de la disparition des frontières, l’apologie de l’immigration, la promotion de l’euthanasie et de l’avortement ou la dépénalisation de la drogue et de la prostitution. En 2018, le même Nils Muiznieks qui théorise la figure de l’ homo sorosensus condamne vivement le projet de loi de Viktor Orbán prévoyant de taxer les ONG qui reçoivent des financements étrangers avec les arguments suivants, explicites : « Les mesures envisagées sont particulièrement préoccupantes dans la mesure où elles concerneront des organisations ou des personnes qui agissent pour protéger les droits des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés, ce qui est parfaitement légitime dans une société démocratique. »