Geneviève Lajoie >
Les députés solidaires souhaitent que l’Assemblée nationale soit plus adaptée à la réalité des élus qui ont de jeunes familles. Plus encore, les politiciennes qui le veulent doivent pouvoir allaiter leur nourrisson en chambre.
Il n’est pas rare de voir une députée fédérale nourrir son enfant dans le brouhaha de la Chambre des communes à Ottawa. Une situation qui ne s’est jamais présentée au Parlement de Québec.
Lorsqu’elle était en politique municipale au Témiscamingue, Émilise Lessard-Therrien allaitait son bébé durant les séances du conseil. Celle qui est devenue députée de Québec solidaire envisage d’avoir un autre enfant et ne se gênera pas pour lui donner le sein au Salon bleu.
«Je trouve l’allaitement quand même super important, dit-elle. Ça risque d’arriver et moi je trouve que ce sont de belles images, ça envoie un message fort».
Émilise Lessard-Therrien dit avoir interrogé récemment le ministre et leader parlementaire du gouvernement Simon Jolin-Barrette à ce sujet lors d’une rencontre du Cercle des jeunes parlementaires.
Encore des clichés
«Il m’a répondu que ça prend du décorum. Je trouve la réponse très floue. Il y a encore des clichés avec l’allaitement : on va-tu voir les seins ? Mais non ! Il y a des vêtements d’allaitement aujourd’hui», lance-t-elle, en entrevue avec notre Bureau parlementaire.
Son collègue d’Hochelaga-Maisonneuve, Alexandre Leduc, a failli faire un discours en chambre avec sa petite Jeanne âgée d’un an et demi en raison d’un conflit d’horaire il y a deux semaines. Finalement, la situation s’est résolue d’elle-même et il n’a pas eu besoin de siéger avec sa fille dans les bras. Mais le solidaire veut croire que la présence d’un enfant au Salon bleu ou dans des salles de commission parlementaire n’est pas malvenue.
«Je ne cherche pas nécessairement à provoquer ça […] Mais je ne veux pas l’éviter non plus, si jamais j’ai un autre rendez-vous comme ça dans les prochaines semaines, je vais venir avec Jeanne.»
Québec solidaire souhaite également qu’un comité indépendant chargé de revoir les conditions de travail des élus se penche sur la possibilité d’ouvrir une halte-garderie au Parlement.
Maman d’une fillette d’un peu plus d’un an et demi, Émilise Lessard-Therrien franchit près de 2000 km chaque semaine en avion entre sa circonscription de Rouyn-Noranda–Témiscamingue et Québec. Sa petite Solène ne l’accompagne généralement qu’une fois par mois dans la capitale nationale.
Pas de chaise haute
À l’Assemblée nationale, rien n’est prévu pour les bambins. Il n’y a pas de table à langer dans les toilettes près des bureaux de députés ni de chaise haute à la cafétéria du Parlement. Pas plus qu’il n’y a de halte-garderie pour les élus, le personnel politique et les employés de l’Assemblée nationale.
«C’est dans l’initiative d’attirer en politique tout le monde, que les projets familiaux ne soient pas un frein à se présenter en politique», insiste Alexandre Leduc.
Un congé parental pour les députés ?
Québec solidaire demande à ce qu’un comité indépendant se penche sur l’instauration d’un congé parental pour les députés.
Les parlementaires étudient en ce moment un projet de loi pour rehausser l’allocation de dépenses des élus de manière à compenser une modification fiscale du fédéral.
Aux yeux de la députée solidaire Émilise Lessard-Therrien, c’est le moment tout indiqué pour revoir plus largement les conditions de travail des élus et réfléchir à la possibilité de leur permettre de s’absenter du Parlement pour une période de temps en raison de la naissance ou de l’adoption d’un enfant. «On voit une fenêtre d’opportunité qui pourrait être intéressante», dit-elle en entrevue avec notre Bureau parlementaire.