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Molière président ?

Christian Rioux

Les Québécois ratent rarement une occasion de critiquer la fascination des Français à l’égard de l’anglais. C’est une bonne chose, même s’il nous arrive parfois de confondre la poutre et la paille.

L’initiative de Vincent You devrait donc nous intéresser. D’autant plus que son histoire éclaire les enjeux de la campagne présidentielle en cours.

Cet adjoint du maire d’Angoulême est aussi directeur de l’hôpital de Confolens, à 50 kilomètres de là. Alors qu’il était responsable de la construction du nouvel hôpital, quelle ne fut pas la surprise de cet élu républicain de découvrir que pratiquement personne ne parlait français sur le chantier. La plupart des ouvriers étaient ce qu’on appelle des « travailleurs détachés » européens qui, bien que payés par un employeur français à des salaires français, continuent à payer des charges sociales ridicules en Pologne ou en Roumanie.

Révolté par cette situation qu’il jugeait inquiétante pour la sécurité du chantier, Vincent You a décidé d’introduire une nouvelle clause dans les contrats des entrepreneurs. Celle-ci les oblige à engager des ouvriers qui comprennent et s’expriment en français sous peine de devoir embaucher un interprète. Vincent You voulait faire d’une pierre deux coups: assurer la sécurité du chantier tout en refusant une directive européenne qui encourage le dumping social.

La « clause Molière » était donc née. Vincent You ne se doutait pas qu’elle se répandrait comme une traînée de poudre. En un an à peine, elle a reçu l’aval de la Fédération française du bâtiment, de nombreux offices HLM, de plusieurs villes et de six régions sur treize. Des régions dirigées tant par la droite que par la gauche. « Dans nos régions, 90 % des élus de gauche comme de droite sont d’accord avec ça, nous a-t-il déclaré. Il n’y a qu’à Paris qu’on ne semble pas tout à fait nous comprendre. »

En effet, cette clause ne semblait déranger personne jusqu’à ce qu’elle se retrouve au coeur de la campagne présidentielle. Il a suffi que la région Île-de-France la fasse adopter et que la présidente du Front national (FN), Marine Le Pen, la soutienne pour mettre le feu aux poudres. Le ministre socialiste de l’Économie Michel Sapin l’a aussitôt qualifiée de « raciste ». Le candidat d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon, d’« hypocrite ». Et le candidat socialiste Benoît Hamon, de « xénophobe ». Syndicats et président du patronat dénoncent en choeur une « dérive nationaliste ». Quant au candidat du centre, Emmanuel Macron, il s’est dit totalement opposé à la suppression de la directive sur les travailleurs détachés. Qu’on se le dise, les Québécois qui tentent tant bien que mal d’imposer la francisation des entreprises de plus de 50 employés pourraient bientôt être traités de racistes en France.

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