Eugène d’Estimauville de Beaumouchel >
Nos journalistes grassement subventionnés seraient-ils devenus paresseux?
La question se pose en ce qui a trait au projet de loi 96.
Le texte législatif a fait grand bruit. Il a généré deux types de réactions dans les médias québécois : il y a ceux qui se plaignent (avec raison) qu’il ne va pas assez loin pour renverser le déclin du français au Québec (ce qui nécessiterait une baisse des seuils migratoires et l’imposition de la loi 101 au cégep, entre autres) et ceux qui trouvent astucieuse la modification unilatérale de la constitution pour y inscrire le caractère national du Québec et officialiser le statut du français en tant que langue d’État (mesure essentiellement symbolique mais somme toute intéressante).
Le chercheur Frédéric Lacroix a résumé le tout ainsi : « les démographes sont beaucoup moins « érotisés » que les juristes par le PL 96 ».
La réaction des éditorialistes du Canada anglais est quant à elle carrément hystérique. Elle oscille entre dénonciation tapageuse du sort réservé aux pauvres anglophones du Québec et indignation face à la prétendue trahison de Justin Trudeau.
Au milieu de toute cette verbigération, un article de Diane Francis a attiré mon attention. Francis et ses collègues du Financial Post font partie des très rares commentateurs canadiens-anglais qui osent dénoncer le suicide migratoire dans lequel le gouvernement Trudeau nous entraîne.
S’ils invoquent généralement des arguments économiques, la journaliste a ici opté pour une approche différente : elle a fait le lien entre la déferlante migratoire voulue par Trudeau et ses conseillers du Century Initiative et une étude scientifique sur la mise en minorité des Canadiens-Français au Québec (un territoire où ils n’ont jamais été minoritaires depuis la Nouvelle-France). Elle a ensuite expliqué que cette marginalisation démographique allait mener à un grave sentiment d’insécurité linguistique chez les francophones, qui se traduirait par des lois linguistiques de plus en plus draconiennes (ce qui n’est évidemment pas souhaitable de son point de vue).
L’argument est surprenant, mais il n’est pas sans fondement. Surtout, Francis a le mérite de ne pas nier le déclin du français au Québec, contrairement à plusieurs médias du ROC (et même du Québec…) et d’identifier clairement la source du problème, à savoir l’immigration.
Parmi ces mesures draconiennes que Francis souhaiterait éviter? La Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, chapeautée par le ministre Jolin-Barette, qui viserait entre autres à empêcher les fonctionnaires de communiquer avec les immigrés en anglais.
Dubitatif, n’ayant rien entendu de tel de la part de nos valeureux journalistes, je consultai ledit projet de loi. Quelle ne fut pas ma surprise de lire en page 15 la disposition suivante :
22.4. Un organisme de l’Administration doit mettre en œuvre des mesures qui assureront, à la fin d’une période de six mois, des communications exclusivement en français avec les personnes immigrantes, lorsque, afin de fournir des services pour l’accueil de ces personnes au sein de la société québécoise, il utilise une autre langue que le français en vertu de l’article 22.3.
Le gouvernement du Québec veut communiquer uniquement en français avec les immigrés et personne n’en parle à part une chroniqueuse canado-américaine basée à Toronto?
On a pourtant passablement entendu parler du fait que l’État allait arrêter de communiquer en anglais avec les entreprises (ce qui est simplement la mise en application d’un article de loi voté en 2002). Que l’État décide de communiquer seulement en français avec les immigrés est bien sûr un geste d’affirmation beaucoup plus fort dont les conséquences seront elles aussi bien plus significatives.
J’aimerais donc remercier Mme Francis qui a semble-t-il lu le projet de loi, contrairement à ses homologues de ce côté-ci de la rivière des Outaouais. De plus, son article a eu le mérite de faire réagir les francophobes rabiques qui lisent son journal. Il est bon de rappeler aux fédéralistes naïfs et aux Québécois dépolitisés que les angloïdes n’ont aucun respect pour nous et qu’ils nous crachent à la gueule lorsqu’ils se croient entre eux.
De toute facon ca ne changera rien. Le declin du francais va se poursuivre. Les statistiques le disent.
Il faut pourrir la vie des immigrants ingrats qui refusent d’apprendre notre langue. Zoum zoum zoum en Ontario!
Vous avez raison.
Cet article ne semble concerner que les services d’accueil. Le problème restera entier si les personnes immigrantes s’adressent par la suite en anglais aux organismes et institutions qui doivent servir la « communauté québécoise d’expression anglaise ». On pense d’abord aux services de santé et aux municipalités, mais en fait, cela concerne la plupart des organismes publics et l’ensemble des établissements commerciaux. La loi 101 ainsi modifiée ne fera jamais que favoriser la connaissance du français, sans pour autant contrer la montée de l’anglais. Le problème est que nous ne formons plus une nation française comme autrefois, que le peuple québécois est légalement constitué d’anglophones et de francophones. Dès qu’un immigrant s’en rend compte, il mesure l’avantage, comme plusieurs de nos jeunes d’ailleurs, à devenir Anglo-Québécois. Merci René!