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Si Angela Merkel remporte les législatives, son parti perd 92 députés et paie notamment les conséquences de sa politique migratoire. Tandis que les sociaux-démocrates poursuivent leur débâcle, la droite radicale en profite pour chambouler le paysage.
A l’issue des élections législatives du 24 septembre, la tendance observée sur le reste du continent aurait-elle fini par gagner l’Allemagne, jusqu’ici considérée comme une relative exception dans le paysage politique européen ? Marquée par une chute spectaculaire des deux principaux partis qui se partagent le pouvoir depuis 1945, cette élection permet également au parti de droite anti-immigration et eurosceptique Alternative pour l’Allemagne (AfD), après seulement quatre années d’existence, de devenir la troisième force politique du pays en envoyant près de 80 députés au Parlement.
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Les résultats préliminaires des élections allemandes.
CDU/CSU : le centre
SPD : les socialistes
AfD : la droite nationale
FDP : la droite libérale
Die Linke : l’extrême-gauche
Grüne : les écologistes
L’effondrement de la CDU (le parti de Mme Merkel, ndlr) est d’autant plus brutal que le parti avait connu en 2013 l’un de ses plus grands succès. Après douze ans d’exercice du pouvoir, Angela Merkel semblait promise à une réélection sans difficultés. Récemment, l’élection de Donald Trump favorisant l’essor d’un renouveau sur la scène diplomatique occidentale, la chancelière avait même renforcé la présence de l’Allemagne sur le terrain diplomatique et militaire, ce que le pays s’était plus ou moins refusé à faire jusqu’alors.
Le tournant de 2015 semble être la cause principale des difficultés dont la CDU paie maintenant les conséquences. A cette époque, la crise des migrants frappant de plein fouet l’Allemagne menace de faire voler en éclat la coalition droite-gauche au pouvoir, avant de compromettre l’unité de la droite elle-même, l’aile la plus conservatrice de son parti réclamant de la chancelière un durcissement de sa politique migratoire. Elle finira par y consentir quelques mois plus tard. Mais, loin d’apporter satisfaction à ses détracteurs, ce changement sera perçu comme une volte-face tardive. Alors que la campagne électorale débute, l’attentat de Berlin en décembre 2016, perpétré par un Tunisien s’étant fait passer pour un mineur réfugié et ayant échappé à la surveillance des services secrets, cristallisera encore davantage les critiques à l’encontre d’Angela Merkel. Un contexte que l’AfD exploitera jusqu’au bout, axant une grande partie de sa campagne sur la critique de la politique migratoire du gouvernement.
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Burka ? Nous sommes en bikinis.
Fais-toi confiance, Allemagne !
Paradoxalement, l’AfD apparaît comme le grand vainqueur de ces élections, et cela pour au moins trois raisons. La première tient à ses résultats électoraux (environ 13%) dont elle peut se vanter, quatre ans seulement après la création du parti. Cette jeune formation eurosceptique et anti-immigration améliore son score de plus de 8% par rapport à 2013 – élections auxquelles elle concourait quelques mois après sa création, et qui lui avait déjà permis d’obtenir un score remarqué.
La seconde explication du succès de l’AfD réside dans la place centrale, notamment médiatique, qu’elle a su conquérir en s’imposant comme un acteur majeur du débat politique, parfois au prix de polémiques contribuant à renforcer son image sulfureuse. Incarnant une opposition radicale à la politique migratoire d’Angela Merkel, quand la plupart des autres partis politiques s’alignaient sur les positions de la chancelière ou l’appelaient à ouvrir encore davantage les portes du pays, l’AfD a su incarner une offre politique jusque-là inexistante. Les chiffres sont d’ailleurs sans ambiguïté : le parti a séduit au moins un million d’électeurs de la CDU et plusieurs centaines de milliers du SPD. Alors que droite et gauche se partageaient le pouvoir, l’AfD n’a pas eu de peine à pointer du doigt l’absence de différence réelle entre leurs programmes respectifs.
Alexander Gaulan et Alice Weidel, les deux têtes d’affiche de l’AfD
Enfin, l’AfD est parvenue à vaincre ses propres divisions. Alors que le Front national français se déchire, quelques mois après son succès relatif à l’élection présidentielle, le parti allemand s’est relevé de ses guerres internes. Après la mise en retrait de sa figure charismatique Frauke Petry, qui souhaitait dédiaboliser l’image de sa formation politique, le triomphe d’une ligne décrite comme plus intransigeante faisait croire aux commentateurs que l’AfD s’essoufflerait. Une baisse dans les sondages à l’automne 2016 paraissait confirmer cette évolution. Finalement, en s’imposant comme troisième force politique du pays, l’AfD démontre l’importance des idées qu’elle revendique au sein de l’électorat allemand.
Si la montée des mouvements populistes en Europe est souvent analysée comme découlant des difficultés économiques, difficile d’appliquer cette même lecture à l’Allemagne, qui affiche une croissance unique en Europe. Quant à l’inégale répartition de ses retombées, elle ne semble pas conduire les électeurs à se tourner vers Die Linke ou les Verts, qui stagnent entre 8% et 11% depuis plus de dix ans. Seuls les libéraux du FDP voient leur score augmenter (de près de 6% par rapport à 2013). Or, leur programme, très proche de celui de la droite sur le plan économique et de la gauche sur certaines question sociétales, s’en démarque très fortement sur un point : l’opposition franche à la politique migratoire conduite ces dernières années par Angela Merkel.
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